(extrait du bulletin "Afders confidences" n°99)

Dipôle expérimental

à quatre haut-parleurs de 8"


L’article "la liaison amplificateur / haut-parleur en considération" (confidences n°91) évoquait l’effet élargisseur de bande passante d’une attaque en courant sur les haut-parleurs électrodynamiques. Amortissement de l'équipage mobile libéré dans le bas du spectre et frein selfique à la bobine réduit dans le haut, pouvant alors nourrir le rêve de sublimer des haut-parleurs déjà appelés "large bande".

Des premiers essais notamment à une séance "Afders" (confidences n°92) ont vite montré qu’il était illusoire d’attendre de la part d’un large bande sans résonateur acoustique, les décibels annoncés sous les cent hertz par une simulation sans contrainte sur les déplacements engendrés. Sur des messages non trapus, le résultat était toutefois fort engageant et donnait de la pertinence à ce mode d'excitation idéalement relié à la force "Bl.I" (confidences n°97).

L’amplificateur à l’origine du dipôle présenté, est né à force d'imaginer des schémas à haut degré de simplicité. Difficile d'expliquer l'intérêt que leurs portent nos oreilles par de conventionnelles mesures en régime permanent mais vérifier le respect des transitoires, par exemple en analysant l'évolution harmonique de la distorsion sur des salves de sinus, serait plus pertinent face au régime musical, distorsion thermique des semi-conducteurs et effet mémoire des isolants en joue. Reste à posséder l'appareil de mesure adéquat ! Le schéma ne compte que quatre transistors à la stabilité thermique reconnue et s'implante sur un circuit imprimé de seulement 6x3cm.

Réduire le nombre d'étages peut cependant conduire à un fonctionnement autre que le sempiternel générateur de tension, entendez un fonctionnement en générateur de courant, avec en facteur discriminant l'impédance interne "Rg". Le tout est de s'en rendre compte et d'exploiter les possibilités nouvelles avant de jeter l'éponge. Deuxième étage en classe A directement en sortie et absence de contre réaction marquent donc le point de lancement sous un coup de crayon au style épuré.

Le coefficient d'amortissement aussi appelé facteur de surtension trouve sa définition dans la théorie de l'automatique linéaire, au chapitre des systèmes du second ordre, ce qu'est en version passe-haut notre haut-parleur quand on parle de sa réponse en pression sonore. Noté "z" dans nos ouvrages français, il devient "Q" chez Thiele & Small, avec pour relation Q = 1/(2z). Q = 0,707 correspond à l'amortissement d'ordinaire optimum (http://www.brouchier.com). Les électroacousticiens détaillent coefficient mécanique Qms et coefficient électrique Qes, qui par leur moyenne redébouchent sur le coefficient total alors noté Qts. L'impédance Rg du générateur sujet à l'optimisation, pourra corriger l'amortissement sans toucher aux contraintes technologiques des haut-parleurs.

Rb : résistance bobine
Rg : impédance du générateur
Bl : facteur de force
Mms : masse mobile
Rms : frottements
Cms : compliance

Le déplacement maximum pour un haut-parleur est d'abord une dimension mécanique, différence entre hauteur de plaque de champ et longueur de bobine mobile, divisée par deux. Aller au-delà se traduit par une distorsion tendant vers l'écrêtage, ceci avant même d'atteindre les limites de la suspension. Le déplacement "x" s'affiche à la simulation en intégrant d'un point de vue mathématique la vitesse "v" issue de la force contre électromotrice "Bl.v" et suit l'allure d'un passe-bas, aussi du second ordre et aussi lié au facteur d'amortissement.

Cette cote souvent faible sur les haut-parleurs large bande doit être le garde-fou à tenir en respect. Le SP-200X de Monacor, bicône suffisamment économique pour nos essais est à 1.6mm, valeur respectable face à la concurrence plus prestigieuse mais insuffisante pour suivre le principe de l'amortissement optimisé du grave par l'impédance du générateur, ce à un niveau réaliste. Employer alors quatre transducteurs multipliera la surface émissive et pourra contrecarrer le "Xmax" trop limitatif.

La répartition de la puissance s'associant à l'attaque en courant permet aussi de s'affranchir de la distorsion de compression citée par J. Parchemin (Confidences n°86), liée à la modulation de la résistance de la bobine par la température et donc par l'enveloppe du signal.

Le rendement d'un réseau de haut-parleurs répond à une loi acoustique qui va nous intéresser lors du montage sur baffle fini. Pour des longueurs d'onde grandes face à l'assemblage des HPs, ici jusqu'à environ 200Hz, deux sources alimentées par le même signal sont dites corrélées et le rendement de la conversion énergétique double (http://www.linkwitzlab.com), donc +3dB d'efficacité en dB/W (et non de sensibilité en dB/2,83V) pour un montage série comme pour un montage parallèle.

Après transition et jusqu'à 5kHz, le décalage des points d'émission donne une production dite non corrélée et le gain en efficacité revient au plus attendu 0dB. Au delà on peut par contre perdre un à deux dB quand les lobes de directivité s'en mêlent.

La mise en panneau ouvert est apparue avec la contrainte du volume considérable demandé quand on charge acoustiquement l'arrière de quatre haut-parleurs de huit pouces. Il n'en faut pas plus pour stimuler davantage l'esprit minimaliste. Après le filtre et ses rotations de phase, l'enceinte et ses colorations disparaissent aussi !
Quatre haut-parleurs et la possibilité du vrai dipôle rayonnant des deux faces sur tout le spectre s'offre alors, donc deux bicônes de face et deux bicônes de dos. L'occasion de limiter les interactions en directivité dans l'aigu, bien que l'idéal serait un seul de face et un seul de dos, à condition d'étudier et de réussir un nouvel amortissement aux basses fréquences, avec un HP au Xmax plus important.

La taille du baffle, non infinie pour respecter la philosophie du panneau dipolaire, doit tout de même interdire un court-circuit acoustique trop rapide. Les travaux de Bill Tsakiris (Finite Baffle Dipole Speakers with Electrodynamic Drivers, preprint AES n°4184, (http://www.aes.org) ont servi à jauger la dimension en partant du calcul simplifié à un baffle circulaire à HP centré. En pratique un écran rectangulaire fermé sur un côté par le sol et aux HPs excentrés va égaliser la réponse et ne retenir quasiment que la coupure basse à –6dB par octave à laquelle s'ajoutera plus bas la coupure à –12dB à la fréquence de résonance des HPs.

a : atténuation relative ( S/L)
T : (L-S) / célérité
S : parcours du pôle "+"
L : parcours du pôle "-" ( R + (R²+S²)1/2 )
R : rayon du baffle

L'impédance laissée à la valeur naturelle de l'amplificateur permet de créer une surtension de +3dB près de la fréquence de résonance, ceci s'ajoutant aux +6dB du réseau sous les 200Hz (+6dB idéalisé et donc apériodique sur le tracé Spice). L'ensemble s'accorde assez bien à un baffle d'une largeur moyennée d'un peu moins d'un mètre et compense le court-circuit acoustique aux basses fréquences. Les tracés de la tension et du courant en sortie de l'amplificateur vérifient la non saturation, tension d'alimentation et courant de repos en plafonds.

La mesure acoustique élémentaire par ses moyens, un sonomètre Sphynx Audio System associé au CD test Stereophile n°2 qui incrémente le spectre en tiers d'octave à wobulation rapide (http://www.britishaudio.co.uk), traduit tout de même un équilibre tonal satisfaisant à la position d'écoute et à niveau raisonnable. Le local est une section de comble aménagé à l'isolation et au traitement phoniques non délaissés. Un tableau Excel recueille les lectures uniquement entre 50 et 8kHz (loi des 400 000 respectée), au delà, les limites du petit sonomètre faussent plus cruellement l'allure.

Une autre façon de faire de l'amplification en mode "courant" (figure 2) : http://sound.westhost.com
Une réalisation (Zs=80R) commerciale de haute volée : http://www.firstwatt.com

Jean-Marc Plantefève
http://perso.wanadoo.fr/jm.plantefeve